La Déclaration Universelle des Droits – et devoirs – de l’Humanité,
Un outil essentiel pour réconcilier l’humain et la planète.
D U D H u
Résumé
Cette déclaration élaborée par un comité international de personnalités présidé par Corinne Lepage *, contient quatre principes (la responsabilité, la dignité qui intègre le droit au développement, la pérennité de l’humanité et l’équité intergénérationnelle) 6 droits et 6 devoirs dans lesquels se reconnaissent les Etats, mais aussi de nombreuses autres parties de la société civile. Liant la nature et l’humain, ces principes fixent les responsabilités de tous et donc de chacun, personne physique ou morale, publique ou privée, nationale ou internationale. Intégrant à la fois les défis écologiques, les défis du développement, de la paix et ceux des révolutions technologiques, la Déclaration vise à englober les responsabilités multiples qui sont celles de notre génération à l’égard de celles qui viennent mais aussi à l’égard de celles qui précèdent. Elle n’a pas vocation à remplacer les textes existants, en particulier la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, ni les conventions internationales arrêtées ou en préparation entre les Etats bâtit un texte complémentaire fixant des droits et des devoirs, non plus individuels, mais collectifs.
* Présidente de l’association des amis de la Déclaration Universelle des Droits de l’Humanité, ancienne Ministre de l’Environnement.
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Auteur·e
Directeur de Green Cross France et Territoires ; Administrateur de l’Association des Amis de la Déclaration des Droits et Devoirs de l’Humanité.
La Déclaration Universelle des Droits de l’Humanité est née dans la perspective de la préparation de la COP 21, répondant à une commande effectuée mi-2015 par le Président de la République François Hollande, qui a confié la présidence de sa mission de préfiguration à l’ancienne ministre de l’Environnement Corinne Lepage. Il s’agit comme le rappelle Jean-Paul Laborde dans son avant-propos au commentaire article par article de la Déclaration [1] d’ « un nouveau concept : celui des droits de tout ce qui ne serait pas uniquement identifié comme la somme des droits de chacun ».
La Déclaration n’est ni un nouveau document international sur l’environnement ni un complément de la Déclaration universelle des droits de l’homme qui garde toute sa place. Il ne s’agit pas d’une convention internationale imposant de nouvelles contraintes aux Etats. Il s’agit de la prise de conscience par l’Humanité, dans sa diversité, de l’unité des problèmes auxquels elle est confrontée même si les responsabilités et les moyens des uns et des autres ne sont pas équivalents.
Ce texte simple contient quatre principes (la responsabilité, la dignité qui intègre le droit au développement, la pérennité de l’humanité et l’équité intergénérationnelle) 6 droits et 6 devoirs, rédigés de manière extrêmement facile à comprendre et aisément traductible dans toutes les langues de la planète. Liant la nature et l’humain, les principes de la déclaration fixent les responsabilités de tous et donc de chacun, personne physique ou morale, publique ou privée, nationale ou internationale. Intégrant à la fois les défis écologiques, les défis du développement, de la paix et ceux des révolutions technologiques, la Déclaration vise à englober les responsabilités multiples qui sont celles de notre génération à l’égard de celles qui viennent mais aussi à l’égard de celles qui précèdent.
Rédigé sous la forme d’une Déclaration, ce texte peut être reconnu, c’est-à-dire signé par toutes et tous via le site http://droitshumanite.fr/sign/, ce qui est une grande originalité et probablement une première. Ceux qui le reconnaissent s’engagent à en mettre en place les principes, les droits et les devoirs, de manière transparente et volontaire.
En complément des individus, de nombreuses institutions ont reconnu le texte :
- Suivant l’exemple de Paris et Strasbourg qui ont été les premières à reconnaître le texte, plus de 20 villes, communautés urbaines, provinces ou régions et autres gouvernements locaux sont désormais signataires de par le monde,
- Les barreaux se sont également mobilisés. D’abord, le barreau français dans sa globalité, sous l’influence des barreaux de Paris, Strasbourg, Marseille. mais également de la conférence des bâtonniers, du conseil national du barreau, de la fédération des jeunes avocats. Ensuite, le barreau européen (conférence des barreaux européens) des barreaux africains (une dizaine de barreaux africains ont signé la déclaration et leurs bâtonniers ont accepté de devenir des ambassadeurs de cette déclaration) et la conférence internationale des barreaux de tradition commune.
- Les universitaires et réseaux académiques soutiennent également le texte. L’université de Modène en a été un des premiers signataires, suivie à ce jour du réseau des grandes écoles de commerce de Lyon, de l’institut international de la francophonie et des chaires Leopold Senghor, de plusieurs universités françaises dont celle d’Aix-Marseille.
- Parmi les ONG accréditées au sens de l’ECOSOC (Nations-Unies), soutenant le texte et l’ayant reconnu, on compte notamment Green Cross, mais également l’OMECA.
- Le monde des entreprises commence à s’intéresser avec la signature d’une trentaine d’entreprises et organisations économiques, et en particulier le Mouvement des Acteurs de la Nouvelle Economie (MENE).
- Sur le plan étatique, interétatique, et international, la Déclaration a été adressée par le Président de la République Française François Hollande à l’ONU en avril 2016. Elle a aujourd’hui le soutien de l’ancien secrétaire général de l’ONU Monsieur Ban Ki Moon et a été reconnue par le conseil économique et social européen. Le Gouvernement des Comores a reconnu le texte, par la voix de son Président, et est donc le premier Etat à l’avoir signé et reconnu.
La Déclaration est soutenue par une association des Amis de la Déclaration universelle des Droits de l’Humanité, présidée par Corinne Lepage et Nicolas Imbert, et comporte un réseau d’ambassadeurs de bonne volonté de la Déclaration, ainsi qu’un comité de soutien. Ces deux organes regroupent des représentants de la société civile et des élus dans leur diversité, et bien au-delà des questions purement environnementales, fédère sur les questions de développement, l’accès aux ressources et aux biens publics et/ou communs, les droits de la nature, la paix et les aux questions de développement technologique. Les parlementaires s’intéressent également la déclaration : divers associations de parlementaires s’en sont saisies et comptent les examiner avant la fin de l’année 2018. Le Forum pour le Développement des Iles du Pacifique (PIDF), lors d’une conférence organisée par la Présidence Fidjienne de la COP 23 (CAPP II), a adopté mi 2018 une déclaration visant à faire tous les efforts pour que le texte puisse être adopté par les différentes parties avant la fin de l’année.
La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme constitue un socle indispensable à la protection, aux droits et libertés de tout individu et nous avons tous qu’il y a encore fort à faire dans le monde pour que cette déclaration soit réellement appliquée. Mais, les défis auxquels l’humanité, de manière collective, est aujourd’hui confrontée : climat, développement, biodiversité, accès aux ressources, préservation du patrimoine, finalité et gestion du progrès technologique …sont d’une telle ampleur et d’une telle gravité qu’ils ne peuvent être abordés que de manière collective, au moyen de droits et de devoirs qui dépassent ceux des individus. L’intérêt général planétaire qui intègre dans un même objectif l’approche anthropocentrée et l’approche écocentrée, exige que la priorité absolue soit donnée à la préservation des espèces, y compris la nôtre, générant pour l’espèce humaine qui est la seule à pouvoir agir à l’égard des autres, une responsabilité unique. Cet intérêt général planétaire n’est aujourd’hui plus défendu par les Etats dans la mesure où il n’est, dans le meilleur des cas, qu’un élément parmi d’autres des politiques publiques, dans une approche très matérialiste et très court-termiste de la croissance. C’est donc la société civile qui prend le relais suscitant dans de très nombreux pays du monde des organisations et associations qui s’inscrivent dans le temps long, un développement compatible avec nos ressources, une agriculture saine, une réelle solidarité dans le temps et dans l’espace.
Ce n’est donc pas un hasard si les collectivités publiques non étatiques ont été parmi les premières à soutenir la déclaration, suivies du monde du droit, d’organisations non-gouvernementales et d’acteurs de la société civile. Ce texte est probablement un des seuls à pouvoir être adopté à la fois par des Etats (à ce jour, un Etat a signé et quelques autres pourraient le faire rapidement) et par des entités publiques autant que par des entités privées. Cette originalité est permise par la nature très particulière du texte qui, parce qu’il concerne l’humanité, affecte toutes les organisations et parce qu’il traite de l’intérêt général planétaire, implique la participation de tous.
En quoi la Déclaration Universelle des Droits de l’Humanité constitue-t-elle une avancée par rapport à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ?
La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme constitue un socle indispensable à la protection, aux droits et libertés de tout individu et nous avons tous qu’il y a encore fort à faire dans le monde pour que cette déclaration soit réellement appliquée. Mais l’humanité est désormais confrontée, de manière collective, à des défis qui ont trait à la continuité de l’espèce, et nécessitent une approche inclusive et cohérence pour passer de la vulnérabilité à la résilience : climat, développement, biodiversité, accès aux ressources, préservation du patrimoine, finalité et gestion du progrès technologique… Ces enjeux sont d’une telle ampleur et d’une telle gravité qu’ils ne peuvent être abordés que de manière collective, au moyen de droits et de devoirs qui dépassent ceux des individus.
L’intérêt général planétaire qui intègre dans un même objectif l’approche anthropocentrée et l’approche écocentrée, exige que la priorité absolue soit donnée à la préservation des espèces, y compris la nôtre. L’espèce humaine étant la seule qui collectivement peut faire le choix de ne pas disparaître, comme le répète souvent Jean-Michel Cousteau, ceci lui confère une responsabilité unique.
L’intérêt général planétaire est une valeur universelle, dont nous sommes tous garants, selon une responsabilité commune et différenciée. Les Etats, qui autrefois prétendaient l’incarner, ne sont désormais qu’un acteur parmi d’autres des politiques publiques, du local au global, et agissent dans un monde qui est passé de l’inter-national au multi-parties-prenantes. C’est donc ce monde multi-parties-prenantes qui est sollicité pour propager, mettre en débat et rendre effectif la DDHU, notamment via des institutions qui s’inscrivent dans le temps long, un développement compatible avec nos ressources, une agriculture saine, une réelle solidarité dans le temps et dans l’espace.
Ce n’est donc pas un hasard si les collectivités publiques non étatiques ont été parmi les premières à soutenir la déclaration, suivies du monde du droit, d’organisations non-gouvernementales et d’acteurs de la société civile. Ce texte est probablement un des seuls à pouvoir être adopté à la fois par des Etats (à ce jour, un Etat a signé et quelques autres pourraient le faire rapidement) et par des entités publiques autant que par des entités privées. Cette originalité est permise par la nature très particulière du texte qui, parce qu’il concerne l’humanité, affecte toutes les organisations et parce qu’il traite de l’intérêt général planétaire, implique la participation de tous.
La reconnaissance rapide du texte accélère-t-elle la mise en œuvre de l’Accord de Paris ?
L’Accord de Paris est en lui-même un outil de droit d’un genre nouveau, tout comme la déclaration. Les 2 se rejoignent en particulier dans leur approche inclusive sur les territoires. L’Accord de Paris mentionne dans son préambule (non contraignant juridiquement) le rôle essentiel de la sécurité alimentaire ainsi que de l’océan. L’article 2 insiste sur résilience et sécurité alimentaire, et en fait un élément important de la lutte contre le dérèglement climatique. Ces notions sont parfaitement décrites et instanciées dans les principes, droits et devoirs de la DDHU.
De même, concernant la mention aux droits humains dans l’Accord de Paris, le terme « humankind » est expressément employé, dans le préambule, ouvrant la possibilité d’une reconnaissance rapide de la déclaration des droits et devoirs de l’humanité : « Acknowledgingthatclimate change is a common concern of humankind, Parties should, when taking action to address climate change, respect, promote and consider their respective obligations on human rights, the right to health, the rights of indigenous peoples, local communities, migrants, children, persons with disabilities and people in vulnerable situations and the right to development, as well as genderequality, empowerment of women and intergenerationalequity ».
Que peut-elle apporter à une ville ou une région ?
Le maire de Strasbourg, premier à signer la déclaration, a parfaitement répondu à cette question. Depuis lors, toutes les villes qui ont adopté la déclaration l’ont fait à l’unanimité, quelle que soit la sensibilité politique. Cela signifie tout simplement que les villes, les départements les régions et plus généralement les collectivités publiques sont aujourd’hui les premiers acteurs et garants auprès de leurs concitoyens de l’adaptation aux transformations indispensables et de la sécurité à court et à long terme.
Que peut-elle apporter à une entreprise ?
Le statut de l’entreprise dans la société change profondément. Au-delà de sa fonction première de production, l’entreprise a plus que jamais besoin de sens pour elle-même et ses salariés. La responsabilité sociale et environnementale fait maintenant partie intégrante du droit. De plus, un certain nombre de pays reconnaissent désormais comme en France un devoir de vigilance ou comme aux États-Unis une responsabilité des sociétés mères pour leurs filiales. Dans tous les cas de figure, l’adhésion à la déclaration universelle des droits de l’humanité affirme pour une entreprise son sens des responsabilités, sa volonté de s’inscrire dans le long terme et de participer à la définition d’une forme d’intérêt général planétaire, et de répondre ainsi de manière positive et engagée aux attentes de ses parties prenantes.
Que peut-elle apporter à une ONG ?
L’objet défendu par l’ONG peut toucher à la lutte pour la protection des droits de l’homme ou la protection de l’environnement mais pas seulement. Lorsqu’une ONG adhère à la DDHu, cela conforte et renforce son action en l’inscrivant dans une perspective intergénérationnelle et dans une logique de long terme ainsi que dans une vision globale. C’est en effet le partage d’un travail commun pour un avenir viable et souhaitable qui est au cœur de toutes les actions des organisations non-gouvernementales.
Que peut-elle apporter à un barreau ?
Les avocats sont les fers de lance de la déclaration universelle. Tous barreaux français, la conférence des barreaux européens, sans doute bientôt une partie du barreau international, 19 barreaux africains et européens ont adhéré à la déclaration. Il est naturel que ce texte soit porté par les avocats, et à terme les avocats du monde entier, tout simplement parce qu’il est dans l’ADN d’un avocat de défendre les droits et que l’humanité plus que tout autre entité a besoin d’être défendue.
Que peut-elle apporter à une université ?
La première université à signer la déclaration a été celle de Modène en Italie et la seconde fut celle d’Aix-en-Provence. Il est évident qu’une université qui a la double caractéristique de porter la recherche et l’enseignement d’une part, la jeunesse d’autre part, est ainsi acteur de l’intérêt général. De ce fait elle se doit d’être un soutien important de la DDHu. C’est notamment par cet engagement que l’université pourra montrer à ses étudiants, ses chercheurs et au grand public sa compréhension et son intérêt pour les enjeux écologiques et humains qui touchent le 21ème siècle.
En quoi diffère-t-elle du pacte pour l’environnement ?
Comme le reconnaît de lui-même le président Fabius les deux démarches sont parfaitement complémentaires mais différentes. Le pacte pour l’environnement est une convention internationale qui ne s’adresse donc qu’aux Etats avec une force contraignante. La déclaration universelle est une déclaration qui s’adresse à tous. Le pacte pour l’environnement fixe des droits déjà reconnus par de nombreuses conventions et qui ne concernent que l’environnement. La déclaration fixe des principes des droits et surtout des devoirs qui vont bien au-delà de l’environnement pour intégrer les questions liées à la paix, au progrès technologique, à l’accès au bien commun et aux ressources, à l’équité intergénérationnelle.
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DÉCLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L’HUMANITÉPRÉAMBULE
Les principesArticle 1 : Les droits de l’humanitéArticle 5 : Les devoirs à l’égard de l’humanitéArticle 11 : |
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Notes
(pour revenir au texte, cliquer sur le numéro de la note)[1] (Déclaration Universelle des Droits de l’Homme : commentaire article par article sous la direction de Christian Huglo et Fabrice Picot Bruylant-2018)
- info document (PDF – 994.3 kio)