Auteur·e·s
Ingénieur de l’école centrale des arts et manufactures, économiste, est membre du secrétariat d’édition de l’encyclopédie du développement durable.
est chargée de mission à l’association 4D et chargée d’étude sur la Transition vers une économie écologique.
Diplômée de l’Ecole Supérieure de Commerce de Rouen en 1999, puis formée en urbanisme et environnement au Conservatoire National des Arts et Métiers (2003) et aux relations extérieures de l’Union Européenne (2006) à l’Université Libre de Bruxelles. A été représentante de la Polynésie française auprès de l’Union Européenne de 2005 à 2010.
Elle est déléguée générale de l’association 4D depuis 2010 et anime depuis 2015, le projet OurLife21 initié par 4D pour stimuler les Objectifs de développement durable (ODD) et l’Accord de Paris dans le quotidien des gens.
Elle est vice-Présidente de ‘Climate Chance’, réseau des acteurs non étatiques engagés pour le climat.
On se demandait : peut-on, par le biais d’un renforcement des tendances actuelles et des perspectives les plus optimistes, répondre aux défis d’un développement durable ? La civilisation verte … en pariant sur une nouvelle rationalité : la maîtrise de soi et de la planète. Si les idéaux sont en panne et que les crises s’affirment, cherchons l’efficacité, la performance… et innovons ! Dès lors soyons pragmatiques et réalistes, tous, états, entreprises et consommateurs. Le nouvel « ordre vert » sera tripartite.
Ainsi, dans un contexte géopolitique marqué par une concurrence exacerbée pour l’accès aux ressources, ce sont les acteurs économiques, entreprises et consommateurs, qui se confrontent. Les premières sont les moteurs de l’innovation et les maîtres d’œuvre de la responsabilité sociale et environnementale, les consommateurs agissent collectivement via les lobbies. Les Etats jouent leur rôle de puissance publique régulatrice.
Le Green New Deal est orchestré par les puissances leaders, dont l’Europe, et soutenu par les instances internationales pour optimiser la gestion des ressources naturelles et répondre aux défis du 21e siècle : l’ouverture de nouveaux marchés verts, l’accroissement des échanges et le développement de nouvelles activités sont sources de création de richesses. Le moteur est l’application d’un double principe : celui de l’efficacité et de la performance. Cela va de pair avec la généralisation de modes de production et de consommation « verts ».
Le consomm’acteur est au cœur de cette grande mutation : parce qu’il est capable de s’organiser, localement et internationalement, il détient un pouvoir de pression inégalé. La civilisation verte fait l’hypothèse que le consumérisme vert, apparu il y a quelques décennies pourrait devenir dominant d’ici 2050 et infléchir efficacement le modèle économique et la gestion des ressources naturelles.
L’ère du consumérisme vert est à son apogée : la consommation qualitative répond en priorité à un souci de bien-être et de santé. Ce souci s’est affirmé dans un contexte de dégradation généralisée de l’environnement, des scandales sanitaires et d’une accumulation des alertes lancées par la société civile. La civilisation verte parie sur la force des individualités au 21e siècle. Le besoin de satisfaction des désirs (illimités et insatiables) s’exprime par le biais de nouvelles formes de consommation, plus sobres, non moins intenses, davantage ciblées et partagées au sein de milieux sociaux d’avant-garde. Les consommateurs ont la capacité d’analyser et tracer un produit, en réponse aux divers scandales sanitaires et boycotts organisés mondiaux. Les medias jouent un rôle primordial, dans cette conversion. L’exemple de personnages charismatiques et vedettes médiatiques est entraînant.
Comment cela peut-il fonctionner ? … grâce notamment aux évolutions technologiques qui offrent des opportunités insoupçonnées en faveur d’une évolution des modes de vie, de communication, de déplacement… mais également des facultés humaines, via les sciences du vivant et cognitives, ainsi que des réponses massives et évolutives aux enjeux écologiques.
La composante technologique de la consommation est élevée (électronique, robotique, nanotechnologies, etc.). Plus fondamentalement, la recherche de performance oriente les trajectoires de vie professionnelles et sentimentales : une performance physique, optimisée par le développement des sciences du vivant et des sciences cognitives, et une performance dite « créative » au service de l’imagination de solutions. Cette recherche de performance se déploie dans l’entreprise, au sein de la famille, dans les réseaux. Dans la civilisation verte, la performance crée l’identité .
L’efficacité s’applique elle aussi comme principe de gestion des facteurs de production, ressources naturelles et capital humain.
La civilisation verte stimule l’ouverture de nouveaux marchés verts : l’accroissement des échanges et le développement de nouvelles activités sont sources de création de richesses. La civilisation verte réussit par ces biais le pari de maintenir sa croissance à des niveaux moyens (2% du PIB ajusté) [1] . Le développement de zones écologiques sanctuarisées s’inscrit dans un souci de préservation.
Le consumérisme vert est soutenu par des politiques d’incitation par les prix et par une fiscalité indirecte (taux de TVA) qui discrimine les produits et services respectueux de l’environnement (étiquetage environnemental, etc…). C’est l’économicisation des défis écologiques.
L’accent est mis, dans les indicateurs de pilotage, sur la productivité des ressources. Les entreprises et les pouvoirs publics sont astreints à une comptabilité environnementale et reçoivent de fortes incitations réglementaires à économiser les ressources, la RSE est appliquée à l’échelle modiale et contraignante. Les multinationales, lorsqu’elles n’ont pas trouvé une déclinaison territoriale de leur activité sur des marchés endogènes, sous-traitent en appliquant les même critères de RSE sur toute la chaine de production.
Les inégalités induites par l’incorporation des externalités environnementales dans les prix sont corrigées par une forte politique de redistribution et de protection sociale..
L’optimisation de la gestion des ressources naturelles est portée par les entreprises en partenariat avec les autorités publiques, et sous l’effet de la pression des consommateurs. Elle se renforce sous l’influence de nouvelles normes et réglementations incluant une fiscalité environnementale et de la montée progressive de la responsabilité sociale et environnementale. Elle est rendue possible par des politiques publiques de soutien à l’innovation, notamment technologique, afin que cette économie réponde à un certain nombre d’exigences écologiques jugées prioritaires : efficacité énergétique, recyclage, protection et productivité maximale des ressources, réduction des émissions de GES. Le développement de zones écologiques sanctuarisées s’inscrit dans un souci de préservation ; les limites sur les ressources sont intégrées dans de nouvelles normes de comptabilité. La civilisation verte réussit par ces biais le pari de maintenir sa croissance à des niveaux moyens (2% du PIB ajusté).
Récit de vie _ Extrait
« Le climat est beaucoup plus agréable et sûr maintenant que les nouveaux systèmes de redistribution ont entraîné l’Europe dans ces nouvelles 20 glorieuses. Mes placements sont assurés par mon courtier/assureur/formateur. Nous avons reçu une subvention pour notre association Etho-consumers. Nos ramifications sont puissantes, la semaine prochaine nous organisons un séminaire franco-russe par visio. Ils ont encore quelques soucis avec des firmes prédatrices de ressources en Arctique. On devra sans doute mobiliser nos réseaux canadiens particulièrement actifs depuis qu’ils sont sortis de l’obscurantisme anti-écologique. Cette activité complète bien mon activité professionnelle, me met aussi dans une veille internationale permanente et ce protectionnisme vert, soyons honnête, sécurise mon secteur. Ce que je souhaite pour mon neveu : être géo-ingénieur. Il n’a que 7 ans d’accord, mais autant réveiller chez lui cette fibre. Si j’ai des doutes parfois : jusqu’où pourra t’on artificialiser la nature ? Ma mère a parfois cette nostalgie du goût de l’eau qui n’aurait pas été maintes fois retraité, de celui des fruits et légumes… mais je crois que ses parents disaient déjà la même chose lorsqu’elle avait mon âge et le ciel violet purifié n’est pas pire que la grisaille polluée du début de ce siècle. »
Tableau de bord
CIVILISATION VERTE | Système économique | Gestion des ressources naturelles | Technologie | Satisfaction individuelle | Rapports sociaux | Cadre démocra-tique |
Notions clés | Economicisation de l’écologie et pouvoir de la demande sur un marché concurrentiel | Efficacité | Course à l’innovation | Propriété / Bien être/ Sécurité | Dérive inégalitaire avec correction redistributive et filet de protection sociale | Démocratie contractuelle |
Tendances lourdes | •Verdissement de l’économie : ouverture de nouveaux marchés et réglementations •Financiarisation de l’environnement ? •Prégnance du secteur privé •ISO 26000 |
•Intégration des contraintes sur les ressources •Sanctuarisation de zones écologiques •Optimisation de la ressource |
•Production localisée •Diffusion top down •Secteurs : TIC, Sciences du vivant, Nanotechnologies, Robotique, Géo ingénierie |
•Individualisme consumériste éclairé
•Technologisation des modes de vie •Performance individuelle (individu « augmenté ») |
•Hétérogénéité sociale, selon : accès aux marchés, aux soins, aux ressources, à la formation, à une consommation « verte », revenus… | •« Real politik » •Gouvernance tripartite (Etat, entreprises, consommateurs) •Régulation par les normes et les règlementations. •Etat régulateur |
Signaux faibles | •RSE
•Transparence et paradis fiscaux / corruption •Protectionnisme vert •Productivité optimisée des ressources / recyclage |
•Cadre juridique et fiscal fort
•Privatisation des ressources naturelles •Dépendance vis-à-vis des matières premières et ressources énergétiques |
•Intégration des technologies dans les modes de vie et les sources satisfactions •Longévité accrue de la vie •Nanotechnologie |
•Niches de consommation « durables »
•Transition des modes de consommation •Identité consommatrices. •Recherche de performance |
•Emergence d’une élite verte et mondialisée, ultra « performante », motrice de l’évolution des comportements. |
•Attentes démocratiques
•Accords bilatéraux et multilatéraux internationaux •Force du lobby citoyen-consommateur •Transparence |
Facteurs d’accélération | •Action citoyenne
•Reporting |
•Investissements publics et privés en R&D, ENR,… |
•Sources de financements innovants (taxes sur les transactions financières etc.) |
•Crises sanitaires, et environnementale Implication des leaders d’opinion. |
•Forte politique publique de redistribution et de sécurité. |
•Accords multilatéraux et décentralisation |
Limites / points de ruptures potentiels |
Durabilité faible / Effet rebond/ Capacité Europe et France de relance de la croissance. |
Privatisation de l’accès et usage aux ressources naturelles Atteinte du facteur 4 possible seulement grâce à stockage carbone et efficacité énergétique (seuils élevés) Incertitude sur l’avenir quant au solutions prises |
Eugénisme Déterminisme technologique Capacité de financement sur la base de PPP Pari sur l’optimisation du recyclage (notamment minérales…) Principe de précaution difficilement appréhendable devant le pari technologique |
Alimentation des frustrations liées aux inégalités Perte de sens Compétitivité sur le travail dans les émergents (et non sur les ressources) prédomine au sein de la mondialisation |
Inégalités, dualité, replis communautaires, élitisme accru : crise sociale ? Risques de montée de la violence face aux inégalités inhérentes |
Massification des actions des consommateurs // pouvoir réel au sein des entreprises ? |
Notes
(pour revenir au texte, cliquer sur le numéro de la note)[1] Ce chiffre est donné à titre d’illustration, comme tous les autres chiffres avancés dans les visions.
- info document (PDF – 377.5 kio)